Articles
Commentaires

Sujets 'Requiems, DEVOIR DE MÉMOIRE'

Sidérés nous étions, entendant Blanchard, enfant pauvre, livreur à vélo, raconter au Canal D, qu’il « démanchait » souvent ses « commandes » pour garder à sa mère, veuve pauvre, une côtelette de porc, quelques saucisses, ensuite il refaisait en vitesse le paquet à livrer. Ô rue Ontario en 1940 ! Où, un peu plus tard, rue Amherst pas loin, un autre garçon se prépare à quitter son atelier pauvre pour obtenir, à Paris, une si fameuse renommée qu’il collectionnera des voitures de luxe, aura un voilier de luxe au large de Nice, Jean-Paul Riopelle. Quand, à 14 ans, Claude Blanchard perdra son pucelage avec des « vieilles » danseuses de vingt ans (!), qu’il s’égosillera dans des boites de nuit mal famées, qu’il sera initiée au « tap danse », moi, en uniforme gris et bleu, j’étudiais le latin et le grec ancien. À bon marché puisque je mentais : « Je ferai un prêtre plus tard ».
Ô rue Ontario ! Un snobisme chasse l’autre ? Un temps, nos élites de l’Union des artistes méprisaient ces « venus du burlesque ». Un snobisme inverti maintenant car une certaine élite proclame que ces anciens d’un vaudeville pitoyable furent de grands créateurs. Pas moins ridicule. Ces spectacles grimaldiens contenaient surtout des sketches d’un humour très bas exploitant les fantasmes les plus grossiers, improvisations bâclés pour faire rire un public d’aliénés. Un opium. Ce théâtre de ruelle ne faisait rien pour stopper l’exploitation des ignorants, au contraire. Mais dans ce lot de cabots cochons sortaient de vrais talents, des exceptions, et il y eut Claude Blanchard.

Suite »

C’est le titre —cette mort comme à proximité— de l’un de mes récents tomes de journal. Jeunes, on ne lit jamais la nécrologie de la gazette. Pas concernés. Je me moquais de ma mère se jetant si vite sur cette colonne de funèbreries !
Moquez-vous, ricanez jeune gens, il y aura votre tour car —vous faites bien de feindre l’ignorer, c’est sain— la vie va vite. Vous arriverez à cet âge où le besoin de compter les rangs —si décimés— inquiète fort. Un aveu : la peur et la joie. Emmêlés quand, un matin, on découvre encore un(e) autre mort « qu’on a connu(e) », parent lointain, ancien ami, vieux copain perdu de vue. Je lis les nécrologies désormais. Je guette. Pas un jour sans « la » nouvelle mortuaire qui énerve. Quoi ? Une joie ? Oui, ce pitoyable : « Ah, c’est pas encore mon tour, c’est lui, un autre ! » La peur aussi, l’angoissant « Clair, mon tour viendra vite maintenant, tant de mes connaissances décédées ! »
Ainsi, début du mois de juillet, je lis et bang ! Mort de l’un de mes chers petits copains de quartier, Jacques Malboeuf. Un « personnage » dans mes livres de souvenirs. Mort d’un inconnu donc, départ d’un anonyme, pas pour moi. Cela à peu près en même temps qu’un courageux célèbre religieux, viré hélas en nostalgique réactionnaire, misanthrope d’une droite louche, le Frère Untel. Fuyant (ou congédié, crise d’octobre-1970 ) subitement son poste d’éditorialiste à La Presse, Jean-Paul Desbiens proclamait : « Il faut fermer le monde ! »

Suite »

On vient d’apprendre la mort de Claude Vermette, fameux céramiste industriel. Un souvenir a surgi. C’était il y a très longtemps, c’était avant, bien avant, les éclats prodigieux de fors talents québécois reconnus à travers le monde : les Robert Lepage, les « Cirque du Soleil », les Céline Dion, les romans de Martel ou de Courtemanche. C’était un temps chétif et Vermette ne savait pas encore qu’il inventerait des céramiques en murales diverses de briques colorées, de carreaux variés, de tuiles sculptées.
Il n’était que le fils du petit boucher de Villeray (rue Beaubien). Il sortait du collège Notre-Dame où un petit frère enseignant, (Jérôme) très « miraculeusement » jetait des feux curieux dans certains esprits juvéniles. En 1950, un petit noiraud de mon âge, 20 ans, maigrichon, rêveur enthousiaste, m’invitait dans sa cave, mal changée en atelier. Il y avait de la bière et du vin rouge, il y avait des énergumènes trépigneurs, des jeunes Mousseau, Filion, et Cie. Le poète Giguère, qui encore ?, qui s’imaginaient follement, tous, un avenir radieux dans la pauvreté de cet antre bétonné.

Suite »

Un dimanche récent, trois pères fêtés : moi, le vieux papa, mon fils, Daniel et mon gendre, Marc. Tours de mini-moto, petits cadeaux, vin rouge sous les épiceas à Val David. Feu sur l’herbe, juteux poulets rôtis et, à la fin, baignade dans le petit lac [...]

Suite »

J’en étais rendu que je l’aimais… comme si… J’avais pour elle une grande affection…comme si… Bon, oui, elle était comme « ma » mère. Une « fausse » vraie maman. Elle est morte dimanche matin. 83 ans. D’abord dire que je voyais plutôt une Juliette Huot pour personnifier ma mère à la télé, dans cette autobiographie (l’adolescence) télévisée titrée « La petite patrie ». Un feuilleton non-conventionnel à sketches, à esquisses, à portraits variés —du quartier Villeray des année 1940. Il obtiendra un succès populaire immense. Que personne dans l’équipe n’avait pu prévoir. La « mamma » de cette série de 80 épisodes vient de nous quitter. À jamais ! Et j’en ai mal.

Suite »

Maurice Falardeau, réalisateur aux dramatiques, n’est plus de ce monde.
À part ses proches, ses amis, ses camarades, le grand public ignorait Maurice alors (paradoxe) que des centaines et des centaines de milliers de Québécois lisaient son nom à maints génériques tant Maurice réalisé de téléromans, émissions populaires.

Suite »

Mon ami Ubaldo, enfant, s’est mis propre —bien peigné, ben habillé— il s’en va visiter son papa interné dans un camp de concentration ! Il n’y va pas souvent, c’est loin Petawawa. Il n’a que dix ans ce petit garçon de la rue Papineau à Montréal et ne saisit pas trop pourquoi la Gendarmerie Royale est venu—un mauvais matin de 1940— chercher son papa. Il y en aura 5,000 à Petawawa

Suite »

Jeunes Turcs, hussards québécois, nous l’admirions. À une « Rencontre d’écrivains » (il l’était, « Apostasies », trois tomes, deux romans), au Chantecler il n’y a pas si longtemps, ce vieillard de 80 ans nous semblait toujours un jeune sacré vif baroudeur, avec sa voix rugueuse, ses brillantes définitions sociales, ses jugements abruptes —à l’emporte-gueule— eh bien, on l’entourait encore. On l’écoutait encore. Jean-Louis Gagnon, qui vient de s’éteindre (ce mot !) à 91 ans, fut un grand pan de mémoire collective, une encyclopédie historique rare.

Suite »

Éteint ! L’expression, vieillotte, rend bien l’idée d’une lumière qui s’en va. Serge Turgeon, acteur, a joué un dernier rôle. Dans une station de police. Où il s’offrait de témoigner volontairement dans une curieuse affaire de meurtre d’une prof du collège Saint-Laurent.

Suite »

Ils disent que tu es mort, Yves Thériault ?
Folie. Fausseté : je pense à toi souvent, Yves, tu n’es donc pas mort. Pas du tout. Un temps on se rencontrait souvent, tu t’en souviens ? Yves, ce qui était fameux, c’est que toi « l’homme plein de livres pleins », tu me jugeais comme ton égal, ton frère, ton bon copain et je n’étais qu’un débutant en écritures. Tu le sais hein, mon vieux Yves, que je te parle d’un temps que les jeunes d’aujourd’hui méconnaissent. 1960 :il y avait trois éditeurs, trois romans nouveaux par année et trois ou quatre cent liseurs de romans québécois. Adolescent, jeune rédacteur poussif et polyvalent, mes modèles d’ici se nommaient Roger Lemelin, mais il était devenu business-man, pouah !, Gabrielle Roy, mais elle était incommunicado, comme cloîtrée en lettres, et toi, Yves Thériault, grouillant grouillot qui se montrait volontiers à des tribunes variées. Alors, je t’avais adopté. Ma mire. Aussi l’homme à abattre évidemment puisque tout jeune écrivain ne songe qu’à les enfoncer tous (Verlaine parlant de Rimbaud).

Suite »

« Précédent - Suivant »

t>