Jan 122015
 

Lu ( le 9 janvier) avec grand intérêt l’article de Cloutier révélant l’inconduite grave de V.L.B. L’éditeur de Trois-Pistoles y fut dénoncé, avec raison, par plusieurs écrivains spoliés. On l’accuse —l’étonnant et surdoué romancier— de ne pas verser les droits de ses édités et il est montré comme un voleur.

J’ai été, un bref temps —pour des tomes de Journal intime et un roman, « Rachel et l’orignal… »— parmi ces écrivains « volés ». C’est très frustrant et je l’ai quitté très écoeuré.

Certes ce cher V.L.B est coupable et indéfendable. Cependant je viens dire que le célèbre barbu du Bas-du-Fleuve qu’il devrait s’en tenir à ses écrits. À ses pontes souvent surprenantes. Le métier d’éditer (« aux frais nombreux », dit-il) n’est pas pour lui.

V.L.B. n’est pas malhonnête, encore moins un brigand, non, il est incompétent (ses livres sont toujours beaux typographiquement ) mais mon ami Beaulieu n’a aucun talent d’administrateur.

Déjà bien maigres (le monde ne lit guère !) les petits profits de nos royalties en littérature doivent être versés évidemment très scrupuleusement.

Je serais tout aussi gnochon que lui, n’ayant aucun talent pour ce très difficile emploi. Il y a bien longtemps, quittant « Le Jour » du brillant Jacques Hébert où il fut initié à ce métier, voilà notre jeune bonhomme écrivant —quelle mouche le piquait ?— mordu de jouer aussi à l’éditeur. Le voilà aujourd’hui épinglé en un honteux « voleur de droits », c’est vrai, j’en témoigne et c’est triste. L’adage : « À chacun son métier » se vérifie. En ce moment le voici en « quêteux » du fric pour un monument scripturaire « autoédité » pour raconter « son » Nietzsche. $300,00 l’exemplaire ! Se versera-t-il honnêtement les droits ?

Claude Jasmin

(Sainte-Adèle)

Déc 172014
 

 

notes : lectorat cher , pas facile de continuer ce récit. Sans cesse je cherche des…situations ? un lieu, un fait…amoureux, comment « continuer » Ma grande peur de l’échec. De devoir abandonner ANGELA, ce serait quoi ? un avorton de plus. Car il y en a eu en cours de carrière.

Ce tout premier amour, adolescent, en une contrée, le Québec de 1947, en un temps plein de puritanisme ambiant. Triste époque. Bien savoir aussi, et bien me souvenir, des prudences obligées pour ne pas trahir las vérité. Ne pas oublier ce strict moralisme chez les Canadiens-français catholiques (comme on s’appelait) du temps. Une morale omniprésente. Une dictature du clergé présent partout. Une censure (et autocensure donc) fort capricieuse. Avouer aussi ma crainte du péché. Ma crainte d’entrainer celle que « j’aime comme un fou » dans le péché. Mais oui, c’était cela jadis. La découverte inopinée des sens s’imposait comme malgré moi. Oh, le bonheur anticipé —si coupable—, de s’y laisser prendre. Songer en cachette à passer à l’acte. Cela, oh oui ! La masturbation, honte solitaire, onanisme détesté, en compensation adolescente. Envie forte donc de transgresser les tabous répandus, le prêche perpétuel dans nos entourages contre « la chair ». Envie chaque fois, à chaque rencontre, de casser le diktat convenu. « Pas avant le mariage ! »

LUNDI PREMIER DÉCEMBRE 2014 - PROPOS LIBRES sur la facturation (?) d’ANGELA

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Déc 022014
 

LUNDI PREMIER DÉCEMBRE 2014

PROPOS LIBRES sur la facturation (?) d’ANGELA

Je veux maintenant attaquer un pan du projet Angela : l’Italie et moi

Je songeais avant de débuter à bien faire savoir et voir une sorte d’attrait chez moi (mystérieux) pour l’Italie et les Italiens.

Certes il y avait le quartier voisin.

Mais…c’était très fort, j’aimais démesurément la langue italienne.

Comment insérer tout cela dans ANGELA ? me dis-je.

J’y jonglais avant même de partir le récit….

.

Ma joie d’aller, par exemple, l’été, d’assister aux messes dans la paroisse voisine italienne. La parlure. Musique à mes oreilles.

Bizarre non ? Les sermons. (Que je tentais de décoder) Du feu…parfois, des menaces : j’entendais : «  peccatorés…flamma… per brularé… per éternella… in inferno et les démonés…etc.

Je songeais même à emmêler dans mon texte avec-sur-dans ANGELA…ce grand amour fou innocent et mes cours chez les Sulpiciens, sur ROME, sur les Césars, à ce collège de futurs prêtres…hum…

où pigewre…oùj’entendajks… : et cette affection totale pour l’ITALIE.

Parler donc de cette belle Angela et mon cours classique… quoi ! Nos traductions du latin; cette version-lecture de « DE BELLA GALLICA » du général Julius C.…hum… FOLIE ?

Comment faire ? Cela…

Je songeais à y mettre le FLAUBERT, non, c’est Stendhal je crois (voir Google vite) fou de l’Italie.

« La Duchesse de… « ou bien LE ROUGE ET LE NOIR. ( le titre?)

Comment…trouver un filon, comment raccorder tout ça avec naturel (et grâce!)…Me servir de papa et sa recherche du VATICAN sur notre vieux radio Marconi …il écoutait son cher pape parlant italien…pourtant.

Vrai que j’aimais écouter longuement =et comme en cachette des voisines italiennes (Mad Diodatti et mad. DiBlasioi) qui causaient sur leur balcon St Denis Street. Oui, une musique.

Buissonneau, mon premier employeur (aux Parcs de la Ville, La Roulotte) à 22 ans, avant la SRC, et qui vient de mourir. Merde.

Écrire un petit requiem. Retrouver mon texte de Radio-Québec.

Marco mon dévoué webmestre, va me retrouver ça, il est bon recherchiste.

De retour à tant de ces archives : déception…

et puis…NON, pas de Stendhal, (Ni Balzac, ni Flaubert) ni rien ! Pas de ses romans, et pas d’Italie littérature,,,pas de bribes de cette CHARTREUSE DE PARME. Ce récit bizarre, flou., louangé par tous de Gide, à Julien Green)

C’est trop complexe, trop écrit,

et ça n’irait pas avec cette limpidité (naïveté aussi )que je veux partout dans Angela.

Fin de cette idée d’une Italie d’auteur du 19 e siècle.

GARDER quoi

trouver quoi, de nouveaux thèmes; lieux, actions, etc.

En somme me replonger, et surtout ravoir 17 ans, ou 18 si on veut.

Je m’y frotte à la prochaine occasion.

Entendu tantôt à la radio : la mort encore, celle une ancienne du burlesque, du vieux music-hall, Murielle Millard. MA mère admirait son…chien.

Souvenir d’une visite à la maison : « Maman, j’ai passé la journée avec ta chère Millard, elle va chanter dans mes décors dimanche À Musiuc-Hall. . » Ma mère : « Chanceux, c’est un grosse vedette tu sais ! »

À y revenir…

Août 122014
 

La semaine de « la fierté gaie » s’est terminé et on peut voir le film «  Yves St-Laurent », couturier célèbre, avec droit à mainte séances « physiques » entre des défilés de mode. Les temps changent. Les homos, c’était tabou il y a pas longtemps. EN 1956, Rentrant (pour trente ans ! ) à la scéno de Radio Canada, deux choses. 1-c’est une mini-ONU : deux Russes (dont Nicolas Sologoub qui vient de mourir), deux Allemands, un Hongrois, un Roumain, un Polonais. 2 : J’y découvre une quinzaine d’homosexuels (souvent surdoués) et s’ensuivent des amitiés. Avec confidences, aveux, confessions. Dès 1960, je rédige « le roman d’une passion homosexuelle et je le titre : « Délivrez-nous du mal » —toujours trouvable en biblio.

Je ne suis ni André Gide —« Coriolan »— ni Marguerite Yourcenar —« Mémoires d’Hadrien »— mais je lis dans une revue parisienne, Arcades : « Enfin un tout premier roman franchement homosexuel et, étonnante surprise, il est signé par un jeune canadien-français-catholique du Québec ! »

Les critiques, dont les deux « papes du temps » —J.Éthier-Blais et G.Marcotte— le louangent fort mais l’éditeur René Ferron se désole de voir revenir des boites « non ouvertes » avec : « Nous ne vendons pas cette sorte de littérature ! »

Avant publication, des journaux ébruitent : « Un roman de Jasmin portera sur la question homosexuelle ». Aussitôt des camarades s’inquiètent : « Merde, qu’est-ce tu oses raconter sur nous ? ». Je les rassure. Mon manuscrit fut offert d’abord à Pierre Tisseyre, mon éditeur de « La corde au cou ». Ce dernier le refusa. « Ah non Jasmin !, non, c’est à réécrire, il n’y a pas de chair, on ne les voit pas vraiment en action ! » Étonnement vu que ce Tisseyre « paraît » son jury —oui, oui— d’un aumônier.

« Délivrez-nous du mal » connut un fort bon succès. Tellement qu’un tout jeune cinéaste —Jean-Claude Lord, avec hélas des moyens de fortune en fit un (bien) long métrage Ses deux homos ? Yvon Deschamps —oui, oui !— et Guy Godin. Plus tard, Alain Stanké le rééditera « en poche ». En 2014, « Délivrez-nous du mal » relu, il semblera très éloigné du « brutal » actuel, du vulgaire scandaleux de tant de « quasi-pornos » à la mode. Cela au ciné comme à la télé. Les amateurs de crudités le jugeront trop nuancé car mon roman n’a rien à voir avec le « hard » et fait plutôt voir des sentiments humains avec nuances et délicatesses. Oui, les temps changent.

Dans ma jeunesse, il y avait des sortes de « grandes folles ». Certes rares. Dans mon quartier Villeray un bizarre travesti, au coin de la rue Bélanger, habitait derrière le cinéma Château, un certain Julien dit Juju. Il faisait des « sorties » fulgurantes tous les dimanches après-midi, ricanant, se dandinant dans les files de spectateurs, ultra maquillé, vêtu d’une robe rouge, d’un chapeau rouge, de souliers rouges, muni d’un sac à main… rouge. Silhouette rubescente, toute écarlate et cramoisie et qui surprenait grandement les loustics rue St Denis. Mon père l’avait comme fidèle client de sa gargotte. Je l’entendis un jour, paternaliste naïf : « Juju, Juju, qu’est-ce que ça vous donne de vous déguiser en femme comme ça ? Rien ! Promettez-moi d’arrêter ça, ces folies-là. » Et j’entendis la fausse femme : « Vous avez raison, m’sieur Jasmin, ça me donne rien et on rit de moé, m’en va vous arrêter ça, c’est promis ! » Et le dimanche suivant il remettait ça bien entendu. Oh !, dire encore sur ce sujet, qu’au cinéma Pine, les deux acteurs jouant le couple homo parisien emblématique (dont Galienne en Pierre Berger) dans le film biographique,  « Yves St-Laurent » est vraiment, mais absolument, extraordinaires.

Jan 312014
 

Comme ma mère, je chante tout le temps. Chaque fin d’après-midi dans mes « saussades » éclaboussantes sous mon petit palétuvier en serre chaude à l’auberge l’Excelsior. Je fredonne n’importe quoi. Dont ces inoubliables « tounes » qui parsèment nos vies. À mon âge, c’est devenu un vaste répertoire. Je navigue entre « la mère Bolduc » et le génial Félix, entre l’admirable Brel et le sombre Ferré; je pige dans ce sac « pop » rempli aussi de folklores en tous genres; même de ces comptines car, devenus vieux, tout remonte, la plus lointaine berceuse, de celles que nous chantonnèrent nos mômans au bord de nos berceaux de bien petits fragiles poupons. Ce que, tous, nous fument un temps, même toi le géant aux chairs abondantes.

Je tends l’oreille tendues chaque fois que j’entends un passant, un voisin, un inconnu, entonner un air. Qu’il sort machinalement de son vieux bagage musical élémentaire. Chanter en somme pour s’empêcher d’angoisser, de trop jongler, oui, on chante parfois pour oublier ? La chanson —on fait mine de l’ignorer— nous est un doux refuge, un abri chaud, un fort bien commode, un lien vital, un familier confort, un tissu sonore romantique, un oreiller de douceur. Souvent, une nostalgie bienvenue dont on a soudain besoin. Les chansons sont un calendrier illustré de mille pages remplies de brefs « bons moments ». Palliatif aux jours sombres de nos vies.

Chaque petite musique apprise par cœur —à force de répétitions— marque avec précision un moment précis de sa vie. Oui, j’aime la chanson et j’ai besoin de la chanson. Je connais des gens qui ne chantent jamais. Qui ne turlutent même pas. Pas le moindre marmottage ne sort de leurs lèvres. Une froideur, une indifférence, de la timidité, de la vanité :

« Je chante faux ! » Honte niaise. Chez ces « durs » pas la moindre ligne musicale, pas même trois ou quatre mesures. Rien ne sort de leurs tristes gosiers —gorges profonde de solitude— rien, aucune petite poésie populaire qui appartient pourtant à tout le monde. Ces personnes « sans chansons » ——comme dans « sans desseins »— me semblent à plaindre.

Apprenons aux petits enfants autour de nous à chanter, gage de bonheur ordinaire pour plus tard, banque facile d’accès. Certes, ces mutiques me sont un mystère à moi qui aime tant chantonner. Matin, midi ou soir. « J’ai pris la main d’une éphémère… », merci Ferré. Ou, Georges Dor : «  si tu savais comme on s’ennuie… ». Surdoué Rivard, « pour aller faire tourner un ballon sur son nez… »

Prise par sa trâlée, Fabienne Thibault, ma mère chantait toujours.de tout, du Jean Lapointe : c’est dans les chansons…du Vigneault : Ah ! que l’hiver… Ou Dor : si tu savais, à la manicouagn… on est des bons larrons cloués à nos amours… Oui, précieux trésor et poésie populaire de tout peuple sur cette terre. Certes les rimes sont prévisibles cher Desjardins : « aux pattes de velours… » et «  la peau de ton tambour ». Humble littérature, très utile les jours de petits malheurs ou de gros chagrins. Avec l’immortel Brel : « Quand on a que l’amour… ou : « Ceux-là sont trop maigres pour être malhonnêtes », à Orly. À dix ans, dans ma ruelle, je gueulais avec Tit-Gilles Morneau du Maurice Chevalier : «  Je chante, je chante soir et matin… ».

 

Août 042013
 

J’observe sans jamais me lasser ma familière troupe de huit (oui, 8) canards. D’où sortent-ils ? Plusieurs fois par jour, ils vont, nerveux et enjoués, vers la plage publique, en reviennent, y retournent et… disparaissent? Nichent-ils là où la Ville détient un petit lopin de terre (basse) à fin écologique. À côté du Chantecler ?

Très comique de les voir en promenade qui plongent la tête sous l’eau ici et là. Qu’ont-ils aperçu ? Comiques ces cocasses culs blancs soudain dressés au ciel ! Que mangent-ils, des insectes, bactéries d’algues ?, des ménés ? Il m’arrive de, vite, couper des branches porteuses de cerises de chèvrefeuille et mes chers « 8 » semblent les apprécier, me reviennent aussitôt pour avaler ces baies sauvages. Quelle beauté naturaliste que ces pataugeurs ailés et à la natation rapide comme invisible. Il faut imaginer ces seize pattes palmées, mini-avirons énergiques en diable. Ces huit long cous, chaque jour offre un brin de sauvagerie en un milieu habité, où la nature est peignée, tondue, organisée; contraste excitant !

Ma crainte de ne pas les revoir, l’été revenu, car mes chers « 8 » me réconfortent. Or, voici que depuis deux semaines, un nouveau venu, un canard… nègre ! Plus gros, noir de plumes. Ce solitaire vient rôder mais pas trop au bord du rivage, méfiant; l’orgueilleux « moineau », au port arrogant est un indépendant, en tous cas, si je l’appelle avec mes baies lancées…c’est non, niet et plouc !, chaque fois il plonge aussitôt et…disparaît. Vraiment. Je guette mais ne le vois plus ressortir de l’onde ! Est-il mi-poisson, mi-canard ?

Belle vie hen, eh oui car je suis très libre ayant achevé mon prochain roman. Le titre ? « L’apiculteur », rendu chez mon éditeur, VLB-Quebecor, sorti en 1974. Promettez-moi de le lire. L’histoire ? Un chimiste défiguré par un bain d’acide, vit terré sous terre. Pour sortir il se déguise en apiculteur et le « chapeau à voile » cache l’horreur. Le monstre s’est construit par les nuits un bunker sous un mausolée abandonné du cimetière, au pied du mont Royal ! Mon éditeur, Martin Balthazar (vlb, quebecor), m’a écrit : « Ici, excités de publier votre récit d’un apiculteur mort-vivant et c’est peu dire… »

Ça stimule en grande, hein ?

Bon, je paresse mais avec une « bibliothèque portative », mon cher « Kindle ». Je lis en ce moment la biographie d’un effrayant « assassin soviétique », Léon Trotski. Qui sera assassiné (au Mexique) sur ordre d’un autre « assassin soviétique », Staline ! On jase là, mon fidèle lectorat l’a bien vu, c’est un « Journal intime » (que l’on mettra en livre après ma mort ?

Mes canards sauvages donc… à Pointe Calumet, étés de ma jeunesse, point de canards, rien de sauvage, que des hordes de vertes rainettes, parfois un coyote, parfois un renard en haut des plages, loin, derrière les chalets en rangées.

Oh, soudain, « la faim, l’herbe tendre » ( selon Lafontaine), j’imaginai m’en faire rôtir de canard un sur notre BBQ ! Honte à mes gênes d’ex-chasseur ! Mais non, ma carabine (à plomb) restera muette et je mijote un nouveau sujet de livre. Tant aimer écrire ! Folie car publier désormais est une activité qui serait « en voie d’extinction », oui, on dit que la littérature agonise, que monde actuel lit de moins en moins. « Ça gueule : piratages, maudits ordinateurs ! ». Et les journaux ? On dit que le célèbre « Washington Post » pourrait fermer, diable, si « Pays d’en Haut » disparaît où trouverais-je un si bel îlot pour épancher ma passion d’écrire ?

Mes canards ne me consoleront pas. En 2020, solitaire et ridicule, j’irai à l’amphithéâtre de la rue Morin pour réciter mes proses. Des gamins, i-pod aux oreilles, i-pad aux mains, riront de ce vieux saltimbanque et, peut-être, lui lanceront des pierres ?

Jan 052013
 

 

Rue Valiquette, les yeux dans l’eau, mais oui, je compatissais aux malheurs des « misérables » de Victor Hugo, mon illustre camarade. Bilan d’un cinéphile, octogénaire : ai-je vu 3000 films dans ma vie ? Ou bien 5000 ? Ou encore 10 000 ? Je ne sais pas. Chez moi, jeune, il n’y avait comme lecture que des annales pieuses, « L’almanach du peuple » de Beauchemin et les exploits des « comics » achetés cinq cennes la brochure. La culture pour les gens de mon époque, de mon quartier, c’était… les « vues ». Gamins, au coin de ma rue Bélanger et St Denis —c’était avant l’air conditionné— on se faufilait (à la barbe des placeurs) par les sorties d’urgence. Sans payer. La belle vie : savourer les films made in France (au Château), ou made in USA, au Rivoli.

Le cinéma a nourri ma jeune imagination et quand j’ai publié mes premiers romans ( Et puis tout est silence, La Corde au cou, Délivrez-nous du mal, Éthel et le terroriste) nos critiques littéraires décrétaient : « Jasmin fait une littérature avant tout cinématographique. » Bien vrai. Tout ça pour dire mon plaisir quand je descend « d’en haut » vers nos salles, rue Morin, rue Valiquette et dire aussi mon bonheur de pouvoir, à 5 minutes de chez moi, « aller aux vues », comme quand j’étais resquilleur.

En passant : ce « Bye-Bye 2012 » à la télé, mode actuelle déplorable, ne fut constitué que de « brefs tableaux ». Parfois « ultra-brefs ». Pourquoi singer les  commerciaux ? Vite, vite, vite, des « flashes », des furtives évocations et refus de bâtir des sketches solides, qui dureraient un peu. Mépris du monde ? « Les gens sont incapables de se concentrer plus d’une minute. » donc sauf un ou deux sketches, parage pressée, défilé d’urgence, policiers qui fessent, mafia et Libéraux corrupteurs, le tout, superficiellement. C’est regrettable quand on constate (et apprécie) les habiletés « inouïes » des créateurs : maquilleurs, perruquiers, prothésistes, costumiers.

Pour fin 2013, prière de revenir, comme souvent jadis, à des tableaux consistants, un peu élaborés. Plus facile de briller par courtes apparitions ? En tos cas le fatras visuel est vite oubliée. Bousculade, cavalcade échevelée. Qui se souvient d’une parodie un peu élaborée ? Qui aurait duré au moins 3 à 4 minutes, sinon 8 ! « Nous, le peuple… » on n’a eu droit qu’à de brillantes caricatures esquissées, aussitôt oubliées,. Mauvais signe cela. L’immortel, anthologique donc, sketch du soldat de la Crise d’octobre, (joué par Guimond), écrit par Gilles Richer, durait plus qu’une minute et demi, non ?

J’y reviens… Redire le plaisir d’aller « aux p’tites vues ». Mon grand bonheur d’être plongé en salle obscure face au grand drap blanc tendu, comme pour une cérémonie chaque fois. Rien à voir avec l’écran de vitre de télé au salon. Voyez ce vaste album à images, « Les misérables ». Très efficace mélodrame hugolien, palpitant récit de la deuxième révolution française, celle de 1848, montrant des gueux galériens, de sombres forêts, une manufacture sordide, un carrefour à putains rivales. Surtout une barricade meurtrière.

À la fin, milliers de figurants, c’est Paris insurgé, affamé, révolté, vues inouïes d’un enterrement solennel (un ministre bien-aimé) qui déclenche l’émeute historique de 1848. « Les misérables », ma foi, c’est pas moins qu’une trentaine de chansons. Jamais vous n’oublierez Jean Valjean chantant en implorant Dieu de laisser vivre le beau Marius blessé. Plus tard, l’audacieux gamin Gavroche. Vous oublierez encore moins Fantine, la voix déchirante de Fantine, misérable (!) mère-célibataire de Cosette. Fascinante Fantine qui agonise en une « chanson criée », pour l’impossible rêve. Courrez-y et apportez vos mouchoirs de papier. Tout autour de moi, les larmes des jeunes filles coulaient à flot. Les jeunes gens, eux, se retenaient. Des gars hein ?

Oct 062012
 


 

Enfant, j’aimais déjà la Chine. À cause des lettres, photos, cartes postales d’Ernest Jasmin, oncle missionnaire là-bas.

Étudiant en céramique, j’ai admiré, extasié, ces poteries ancestrales mirifiques, enfin, professeur d’histoire, j’ai découvert —et fait aimer— une Chine culturelle riche sur tant de plans et dans tellement de domaines. Voyez la Chine bien aimée du « boss » de La Presse, M. André Desmarais. Il la raconte au reporter Howard Green du réseau BNN. Amour extrêmement réducteur : « la piastre ! » Lisez, c’est triste :

 

1- « La Chine constitue une opportunité économique …

Une relation positive sur le plan des affaires ».

2- « Il faut voir le développement qui s’y fait au fil du temps…

Cette évolution peut avoir des effets sur une entreprise (Power Corporation ?) ».

3- « Dans toutes leurs entreprises …ils sont si novateurs »…

« On peut avoir du rapport avec les occasions qui s’offrent à nous ».

4- « Ils veulent évoluer sur le plan économique… »…« 8% de croissance annuelle… c’est du bénéfice net pour le Canada ».

5- « Nos ressources naturelles… ce seul marché prospère vite…  L’offre acceptée… ces transactions sont bonnes pour nous… nos intérêts sont satisfaits ».

6- « La Chine dont les 1,4 milliards d’habitants luttent pour l’amélioration économique… »

7- « Ennemi ? Je vois rien que les Chinois aient fait sur le plan politique pour y voir quoi que ce soit… « Pour l’instant (…) le développement de la Chine est pour nous une merveilleuse occasion économique »…Si 1,4 milliards de personnes se sortent de la pauvreté, continuent à avancer vers plus de richesse, c’est pas mauvais pour nous et le monde ».

Business, occasions d’affaires, bénéfices, exploitation, profits et pas un seul mot sur « arts, spectacles, littérature », (passé ou présent) des Chinois. Pire, pas un mot —« rien », dit-il— de reproche à propos des nombreux dissidents chinois en prison. Quel esprit riche hein ?

 

Claude Jasmin

Écrivain, Ste Adèle.

 

 

Mar 052012
 

 

 

Joie folle, enfant, que nos premiers films montrés au sous-sol de notre église. Quelle évasion ! Bonheur d’aaller à quinze ans, une première fois, au « vrai » cinéma du coin de ma rue, le Château.

Dans notre vaste région de collines, aucun cinéma à partir de Lafontaine, Saint Hyppolite…  Ni à Ste Agathe, ni à St-Sauveur ? Pas un seul grand écran. Rien. Ici, nous sommes chanceux, il y a Tom Farmanian, il y a ses salles de Sainte Adèle ! Quel bonheur pour les cinéphiles. Certes, Tom doit afficher les gros succès populaires. Il a ses frais, tant de factures et de taxes à payer mais, cinéphile lui-même, il offre aussi les meilleurs productions du moment.

Le cinéma Pine est une des bonnes raisons d’aimer vivre par ici. Remercions Tom —qui a été honoré avec justice récemment— son travail acharné nous permet, comme les citadins de la métropole du Québec, de voir le cinéma dont « on parle ». J’y ai vu « L’artiste », gadget très vide —en muet et en noir et blanc et je fais partie de cette minorité (sans doute !) qui a viscéralement détesté ce « navet » (selon notre couple). Mais les p’tits vieux du jury des Prix Oscars, eux, ont été flattés de cet hommage venant des frenchmen voulant saluer (sans scénario structuré) les pionniers d’Hollywood.

Dimanche, au lieu d’aller me balader sur le lac Rond au beau soleil, on a été voir vu le film iranien qui a battu « Monsieur Lazhard ». Je n’ai rien d’un chauvin (aller vérifier) : « La séparation » est un très long et très bavard et très ennuyeux face à face —bien film et bien joué cependant. Un paquet de fieffés menteurs empêtrés dans une querelle bien bête et qui n’en finit pas. L’impression que « La séparation » dure six heures !

Il n’en reste pas moins que malgré des déceptions,  et c’est fatal, nous avons la chance de voir les films « dont on parle ». C’est important. Chaque fois que nous descendons la Côte-Morin pour y aller, on a l’impression, de vacances, l’été, d’aller au ciné Ogunquit dans le Maine, ou en Floride jadis !

Hélas, on me dit que les jeunes visionnent sur le « tout petit » écran de leur ordinateur, connecté souvent au « petit écran » de leur télé, un cinéma, me dit-on, aux centaines de choix. Mais il n’y a rien d’aussi festif que de se rendre à une salle noire, se retrouver solitaires mais solidaires avec les autres. Non ? Hélas, comme la peinture, la musique qui se fait, où la littérature (je le sais trop !) et la danse donc, les créateurs sont méprisés par cette jeunesse rivée à l’ordi. Voilà une masturbation, oui, un onanisme via le web sur le net. On a dit que l’arrivée de la télévision (automne 1952) avait tué les artistes de variété, les cabarets, etc. On peut dire que la venue de l’ordinateur tue aussi. Pourquoi se priver de ces réunions humains où ça tousse, ça remue, ça s’émeut, ça grouille, ça mange du maïs ou de la réglisse, ça vit ensemble, c’est un grand tort. Ne grave erreur. Disons même une forme de déshumanisation —une de plus. De grâce, un effort villageois des alentours, allez au cinéma  Pine. Ceci n’est pas une pause « publicitaire », c’est un appel en faveur d’un minimum de vie grégaire, de vie humaine normale pour une existence un peu communautaire.

Tenez, allez vite voir « POLISSE », un vrai petit chef d’œuvre de madame Maïween qui est aussi excellente actrice dans son film. Un captivant récit sur des faits vécus dans Paris. Récits fascinants avec des jeunes gendarmes, tous excellents acteurs des deux sexes. Voyez une jeunesse vivante ! Merci Tom !

 

 

Mar 252011
 

Je ne suis pas tout à fait, à Sainte Adèle,  «un enfant du pays » même c’est par ici que j’ai habité le plus longtemps dans mon existence. Désormais, j’en sus venu à aimer cette contrée de collines et de brefs vallons. D’une sorte d’affection…absolument immense ! Oui, immense. Aussi je reconnais que c’est un très vif plaisir de rencontrer pour jaser du passé d’ici des « vieux de la vielle » et des « vieilles du vieux ».

Chez mon coiffeur émérite (hum, facile avec si peu de poils sur le coco !), Racette, l’autre midi, une rencontre inopinéee, un certain  Jacques Patry.  C’est un sosie du comédien Claude Blanchard et il a aussi sa bonhomie, sa faconde. On sent chez Patry, comme chez le célèbre cabaretier Blanchard, un « fun vert » à ..causer. C’est ainsi qu’en ce jour de tonte et de taille de barbe, j’ai eu la chance de recevoir de M. Patry, deux imprimés. Un :  « L’histoire de Sainte Adèle », rédigée parcimonieusement —un vrai notaire !— par un bon et brave prêtre. Qui verse volontiers sans l’écriture euphorique et  catholique. De l’hagiographie, ce qu veut dire « tout le monde il est beau, tout le monde il est bon ».

C’est, disons, candide, propagandiste et, ma foi, un tantinet embarrassant. Il évoque, par exemple,  le fameux caractère acariâtre et emporté du Curé « politicien » Labelle mais comme en s’excusant d’oser le révéler. Je souriais souvent.

Il n’y avait donc dans ces laborieux et durs commencements de nos villages laurentidiens (sic) que des âmes pieuses, toutes dévouées aux autres, des travailleurs au zèle incommensurable ! Bref, de très exemplaires « bons catholiques » selon l’expression de jadis.  C’est un livre d’avant nos progrès, notre modernité, nos conforts (et nos désordres certes ) avec ce que tout cela peu comporté d’aveuglement. Silence de convenance donc sur les graves misères, qui furent sans doute réelles, et qui sont évoqués rapidement (comme en passant et avec lyrisme) ici et là. L’auteur en soutane —il écrit dans un bon style, ancien et très correct— tente de gommer le plus possible les labeurs surhumains —agriculture maigre, foresterie harassante car sans engins modernes— de nos premiers colons du Nord. N’empêche on lit ce court 150 pages —allez à la biblio— avec grand contentement. Merci M. Patry ! On imagine que partout dans le monde, à toutes les époques, les débuts d’un village, d’une colonie, voire d’un simple hameau devait exiger tous ces sacrifices parfois extravagants. Souvent,  épouvantables.

Le deuxième bouquin est un album. Que des photographies du village, plusieurs captivantes, essentielles mais, hélas  beaucoup d’autres plus banales et, ici et là, carrément insignifiantes. Choix trop mince ou amateurisme ? Comment savoir. Cet album —avec de trop rares photos hors du commun— a été imprimé et publié il y a quelques années seulement et pourtant il n’a rien de bien moderne dans sa confection. Les « légendes » explicatives sous les clichés anciens sont écrites sans grand talent, ici et là, parfois même accablantes d’ineptie, racoleurs à l’occasion.

Je suis reconnaissant à ce voisin du Barbier des sportifs, Chemin Pierre-Péladeau, de ses deux prêts. J’en suis sorti heureux. De cette monographie surtout, de l’album un peu moins. Cette littérature bon enfant m’a fait me souvenir de ces pieux livres de « prix de fin d’année »,  à l’école ou au collège. Un stock bien censuré et bien autorisé par ce haut clergé qui accordait —en latin du Vatican— et pas toujours, l’imprimatur. Ce « nihil obstat », qu’on voit en page de garde dans « L’histoire de Sainte Adèle ». Alias : droit d’imprimer sans se faire excommunier !

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