« MAIS VOIR UN AMI PLEURER », (Brel)
16 septembre 2007 | 1-Tout, Poing-comme-net, Requiems, DEVOIR DE MÉMOIRE, Souvenirs
Il pleuvait. Un samedi matin bien gris. Dans l’église, sur un podium, une urne. Funèbre. Dedans, Julien, un ami mort, un ami de jeunesse. Dernière rencontre. L’épousée, veuve, pleure. Ma compagne pleure. Je me retiens car « un homme » ne pleure pas, c’est tout entendu. J’ai mal, si mal pourtant.
J’assiste à l’enterrement d’une partie de mon passé, d’un temps révolu, celui d’une petite troupe de vaillants et preux mousquetaires quand nous avions vingt ans. Que nous étions excédés par une société puritaine, fragile, à l’identité incertaine « dans un pays incertain », cher Jacques Ferron. L’on s’agitait fort tous les quatre. Oui, quatre comme dans « Les trois mousquetaires. »
Michel, Roger, Guy et moi. Et, lui, dans une urne, Julien ? Lui, le cinquième membre, « à part », différent de nous les futurs artistes puisque Julien achevait ses études classiques lui, et s’en ira en droit, à l’université, lui. L’unique futur « professionnel » dans notre bande, resté fidèle malgré tout à ses camarades « les rêveurs ». Bravant nos parents anxieux : « Vous serez sans métier sérieux, vous vous préparez un avenir de misère ». Nous enragions puisque, c’est tout vu, nous allions transformer cette pseudo-culture niaise qui nous entourait, nous abrutissait, nous empoisonnait. Nous serions des Malraux, des Picasso québécois, c’était Borduas, « le congédié », qui avait raison, oui, oui, il fallait abattre toutes les cloisons et vivre libre !