Articles
Commentaires

Archives 'enfance'

J’ai signé un long texte sur « Outremont aujourd’hui » dans un bel album illustré, publication de notre Société d’histoire d’Outremont. Je pourrais en rajouter. Que j’aime les écrivains qui se font les chantres des leurs petites patries. On sait que j’ai voulu illustrer durablement mon Villeray natal et que Tremblay le fit efficacement pour « son » Plateau. Du temps d‘avant la « gentrification bobo » du lieu. Jean Hamelin, Pierre Petel aussi, tentèrent de bien « marquer » Hochelaga-Maisonneuve. Ce quartier si bellement « peint » par Marc-Aurèle Fortin. Arthur Gladu publia un fort bon témoignage sur « son » village, rasé hélas, en bas du Faubourg-à-melasse, lieu aboli où se dressa Radio-Canada. J’oublie le titre hélas !

J’avais lu « la petit patrie » (un autre titre oublié) de Massouf, ce fameux écrivain égyptien mort récemment, un prix Nobel. Son livre racontait son enfance et quelle surprise d’y retrouver des rues, des ruelles, des enfants au jeu, des marchands ambulants, une faune pas loin du Nil et pourtant toute semblable à la mienne. Même joie de lire aussi sur un quartier parisien, Belleville. Mosaïque fervente avec de guillerets voyous, une murale nostalgique d’un observateur à la fidèle mémoire. Comme ce fut une joie de « voir » —on lit pour voir— un « marais » parisienn, celui de Pennac avec ses grouillants habitants, sa tribu des Malaussènes.

Je songe à illustrer un jour Bordeaux, le vieux. Lise Bissonnette —qui y habite maintenant une maison rénovée boulevard Gouin— a commencé à le faire avec son trop bref « La flouve ». J’y ai habité une quinzaine d’années. De 1962 à 1978. Quittant mon Bordeaux pour Outremont, je découvrais encore une sorte de gros village, je constatais qu’Outremont n’était pas cette « réserve de snobs », de mondains sur-instruits, tant moqué. Pas du tout. Outremont, dès 1986, me parut un lieu fort convivial avec, tout autour, rue Van Horne, rue Laurier, rue Bernard, ses marchands utiles, ses écoles, ses parcs, ses vieux arbres partout. Des « villageois » modestes à l’est, rue Lajoie, rue Ducharme. J’y dénichais une vie active, rien à voir avec un chic « ghetto » silencieux et verrouillé, fermé aux autres, Fin pour moi du « cliché » facile, du stéréotype répandu méchamment.

Suite »

Le village natal du célèbre avare de Grignon semble « magique », il a donné de bien jolies chansons. De Félix Leclerc à Ferland. On ne compte plus les artistes qui l’adoptent, jadis comme de nos jours. C’est au coin du resto Le Petit Chaudron qu’un génie unique en paysages fauvistes, fit une chute gravissime, tomba de son vélo chargé de toiles vierges, garni de pinceaux et de boites de tubes. Marc-Aurèle Fortin, venu de Sainte Rose, hélas, refusa tout examen. Séquelle, dit-on : il se fera couper une jambe !

C’est à Sainte-Adèle que LaPalme, peintre et caricaturiste, composa une fresque inouïe sur le bitume, de haut en bas de la côte Morin. Étonné, le Times de New-York en publia la photo ! Dans les années 40 et 50, Sainte-Adèle contenait un Centre d’art actif avec (pour adultes et jeunes) cours de peinture, de céramique, de danse et de théâtre. Et concerts. Et un « salon du livre » dans le curling du Chantecler. C’était un village vraiment magique.

Les temps changent. Je lis les excellents billets de Pilote —« Génération fuckée ? »— et Dallard —« Les imbéciles » invincibles, mes jeunes collègues sont fort inquiets, à raison, des noires « fresques » télévisées illustrant une certaine jeunesse. Des trentenaires, filles et garçons, d’une irresponsabilité sociale navrante et puante, « Les Invincibles » et « La Galère ».

Suite »

Citations

Jasmin à Christiane Charette
Celui qui n’a pas peur, qui n’a peur de rien est un imbécile. Ou un désespéré.
Extrait de Revoir Ethel
C’est le pire des égoïsmes, cette stupide quête de l’amour.
Extrait de Revoir Rethel
Écrire n’est pas un métier. C’est une vocation.
Extrait d’une interview dans Cyberpresse.ca - 21 Avril 2002
Gardons l’esprit [...]

Suite »

Un bobard ? Une rumeur des « vieux » pour effrayer les enfants ? Nous avions un petit peu peur mais, gamins, on continuait à creuser des tunnels et des forts-de-neige dans les hauts congères du bord de la rue. C’était au temps où l’on déneigeait pas bien rapidement les voies publiques en hiver. Après chaque grosse tempête, après le passage de la charrue à deux chevaux, c’était la récréation folle. Hauts murets de neige tassée bienvenus et nous sortions nos pelles —toujours peintes en rouge, tiens !

Oh le bon temps des enfants-architectes à mitaines, à foulards et tuques, élaboration de labyrinthiques tunnels le long des trottoirs. « Prenez-garde ! —répétaient les empêcheurs de jouer librement— la souffleuse vous avalera tout rond ! » Ah, ces parents timorés !

Cinquante ans plus tard, voyez-moi en ces années 1990, retraité, cheveux blanc et rares, pis de nostalgie de ces creusages impétueux et qui part, avec mes gamins, à la recherche des « bancs de neige » d’antan. Je tentais de transmettre une tradition enfantine, avec les fils de ma fille, David, Laurent et le benjamin, Gabriel (le musicien-corniste dont j’ai parlé), chacun avec sa petite pelle d’architecte… recherche de hauts congères et, bingo !, voici un dépôt à neiges municipal.

Suite »

Conte pour le FM 98,5 (avec Paul Arcand) lu par l’auteur vendredi matin, 22 décembre 2006

Je regardais par la fenêtre tomber tant de neige. Dans une heure ou deux, devoir me rendre dans la sacristie de Ste-Cécile et mettre ma petite soutane rouge d’enfant de chœur, m on beau surplis de fine dentelle et m’emparer d’un flambeau de velours avec, j’espère, un lampion bleu. J’ai hâte. J’aime la chorale du père de Tit-Claude Léveillée au jubé, la lumière partout, la crèche élaborée devant l’autel à St-Joseph, l’orgue puissant qui va fracasser la nef. Ma mère —l’argenterie frottée brillait— écoutait à la radio la belle voix de Duquesne parlant d’un caporal dangereux, Adolph Hitler. Maman achevait de dresser sa table pour le réveillon avec, au centre, une belle carafe en verre taillé avec du vin rouge « St-Georges », des chandeliers s’installaient. Et maintenant, à la radio, la Charlotte-putain de Richepin braillait : « Faites-moi trouver un portefeuille bien garni… À moi plutôt qu’aux balayeurs… Voyez mes mains gercées…O Sainte-Vierge, venez me chercher, j’en peux plus de grelotter…… » Ma mère encore émue puis elle a regardé l’horloge-à-pendule de la cuisine, dix heures sonne : « CLAUDE ! TON PÈRE N’EST PAS ENCORE REVENU DE CHEZ SES CHINOIS DU BAS DE LA VILLE. »

Suite »

CHINOISERIES

[CHINOISERIES | Roman-récit | Premier chapitre d'un roman de Claude Jasmin publié en mars 2007 chez VLB éditeur.
ISBN-10 : 2-89005-974-X
ISBN-13 : 978-2-89005-974-0

Communiqué de presse
Jasmin présentant Chinoiserie à Tout le monde en parle.
Jasmin en entrevue avec Raymond Cloutier à l'émission Tour de piste - 2007-04-01
[audio:http://www.claudejasmin.com/wordpress/wp-content/uploads/2007/04/jasmin-2007-04-01.mp3]

Jasmin à Christiane Charette (2007-04-03)
“Mon oncle de Chine” par Christian Desmeules, le [...]

Suite »

Le métro de Montréal était tout neuf, tout jeune. Enfant, je me contentais de zieuter le si beau train électrique (Liorel ?) offert aux enfants-de-riches dans la vitrine chez Lord, au coin de Faillon et Saint-Denis (quincaillerie ou le papa du cinéaste Lord travaillait).

Et voilà que l’on m’offrait un gigantesque jouet, le métro.

Un directeur, M. Jeanotte, m’accordait le permis d’y jouer avec mes camarades. « Vous recevrez des autorisations avec « passeports. Il est à vous pour toute la semaine. Mais de nuit seulement pour l’ entrepôt-garage, rue Crémazie. La joie !

Un réalisateur de Radio-Canada, Jean Letarte, m’avait commandé un texte inédit. Avec un budget pas bien épais, un reste d ’argent à dépenser vite en fin d’année fiscale. Faut vider les coffres en bureaucraties d’État si on veut recevoir un neuf budget étoffé, m’avait-il expliqué. « Claude, si tu me pondais « un chemin de croix », bien moderne, ça te dit ? Pâques s’en vient. »

«Un chemin de croix dans le métro»

Suite »

Cette affaire-Dawson ? Ce fut à la radio et à la télé un bain, une immersion totale, de… franglais, patois curieux, sabir cocasse. Charabia parfois. Restons étonnés : il y a quelques décennies, nous aurions (nous les 82 % de la population) écouté des propos in english only. Il y a donc petit progrès ? Oh oui ! Au moins, ces « séparatistes » de l’ouest « baragouinent » notre langue (celle de 82 % de la population autour d’eux, répétons-le). Ce jour-là, soudain, il n’y avait plus rien qui se passait dans le monde. Silence et paix à Bagdad et en pays-talibanesque. Au Darfour du Soudan , arrêt du massacre islamiste ! Bizarre !

Soudain, la terre entière n’avait plus aucun poids, il n’y avait que ce délirant suicidé de 25 ans, venu de son bungalow tranquille de Laval, quittant son site lugubre à l’ordinateur, descendu en ville, en quartier « bloke », dans son « char », bien entraîné ( en salle de tir !) bien armé.

Et qui tue pour se faire tuer.

Suite »

« Être apatride, un grand malheur » selon Dostoïevski. Oh oui ! Il y a des êtres éprouvant le besoin de se déraciner, un amusement de jeunes bourgeois inconscients qui renient avec superbe les racines. Parfois c’est la honte face à un pays sans aucun prestige. Et puis il y a l’ambition : réussir à Paris, à New-York. Chantons: « Chagrin d’exil dure un moment mais « american dream » dure toujours. » Il y a donc des jeunes bobos nantis, qui jouent les « citoyens du monde », des « gâtés pourris » de la jet set qui, nigauds, diront : « Mon pays c’est la terre entière ». Vieillis, on les voit rentrer chez eux pour fouiller avec ardeur leurs racines abandonnées.

Pour le commun des mortels, c’est un grand malheur que de devoir abandonner sa patrie. Le doué Dany Laferrière, Haïtien exilé, profitant ici d’une discrimination positive à incessants voyages subventionnés avec acceuil dans un grand quotidien (La Presse), va très fréquemment rédiger (culpabilisé ?) sur « sa patrie abandonnée » ! Fatal. Normal. Les racines sont fortes. Certes, menacés, pour survivre, certains doivent absolument oublier l’adage fameux du « Aucune terre n’est si douce que celle où l’on est née » (Louis de Ratisbonne ).

Mais la patrie première, celle de leur enfance, de leur jeunesse, reste inoubliable. Devoir s’intégrer à une autre nation ne doit pas être chose facile, pour personne. Déraciné je ne réussirais pas mieux que quiconque. On a vu ce fait têtu dans nos ghettos montréalais lors des finales du soccer, récemment.

Suite »

J’avais cinq ans et demi, papa venait de subir un hold up dans son magasin de la rue Saint-Hubert à l’enseigne proclamant « Thés, cafés, épices, bibelots de Chine ». Émoi dans la famille ! Il avait été ligoté, bâillonné et on avait vidé sa modeste caisse ! Papa, sous le choc, décidait de fermer boutique et de faire creuser la cave du logis familial rue Saint-Denis, d’ouvrir ce restaurant au sous-sol où il alla s’enfermer le reste de sa vie. Que j’ai illustré (via le bon comédien Jacques Galipeau) dans le feuilleton télévisé (« La petite patrie ») des dimanches soirs à Radio Canada, de septembre 1974 à juin 1976.
Ses stocks restants de chinoiseries furent donc entreposés dans la shed, cela sera mon plaisir, ma joie, mes accessoires pour, avec mes petits copains de Villeray, des défilés, bruyantes parades improvisés, dans la ruelle, processions enchinoisées de gamins, avec tambours, clochettes, flûtes, chapeaux pointus, parasols, éventails et kimonos dorés. Un très gras bouddha de porcelaine blanche nous souriait près de la fournaise à charbon derrière le restaurant. « Déjà petit enfant j’aimais » (Léo Ferré) …cette Chine lointaine. J’avais une autre raison.
J’ai retrouvé, et relu, des lettres du frère de papa, oncle exilé vingt ans, prêtre missionnaire, en Chine du nord. Que j’aimais recevoir, enfant, ces longues lettres avec des photos qui m’intriguaient et m’enchantaient, des cartes postales exotiques. Cela me fit tellement rêver ! Je viens de terminer un roman-récit sur cette Chine de légende, mon manuscrit est maintenant en lecture chez des éditeurs, je guette un « oui, on le publie ».

Suite »

« Précédent - Suivant »

t>